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incipit Education sentimentale (version rédigée)

Publié le

L'introduction et la conclusion ne sont pas présentes.

Dans un premier temps, nous allons montrer que cet incipit met en place un cadre réaliste. En effet, on peut relever dans le texte différents éléments qui témoignent de l’ancrage de l’action dans la réalité du lecteur du XIXème siècle. Le narrateur mentionne des lieux géographiques parisiens réels : « le quai Saint-Bernard » (l2) ; « l’île Saint-Louis », « la Cité », « Notre-Dame » (l14). D’autre part, le texte s’ouvre sur une indication temporelle précise comprenant une date et une heure : « Le 15 septembre 1840, vers six heures du matin » (l 1). Le type de bateau décrit est typique du XIXème siècle, époque de la révolution industrielle, puisqu’il s’agit d’un bateau à vapeur. De même, le nom de ce bateau évoque à nouveau une ville réelle, à proximité de la capitale : « La Ville-de-Montereau ».

De plus, pour rendre cet incipit réaliste, le narrateur s’emploie à rendre l’effervescence du départ. Le deuxième paragraphe décrit l’activité qui règne sur le quai au moment de l’embarquement. Pour mimer la cohue est employée une énumération construite à l’aide propositions brèves et juxtaposées, séparées par un point-virgule. On remarque également que les sujets des verbes sont soit des êtres animés (« des gens », « les matelots ») ; soit des objets (énumération « barriques, câbles, corbeilles de linge » et « les colis » : l’entrecroisement des différents types de sujets cherche à reproduire la confusion présente juste avant le départ du bateau. Les verbes d’action concourent au même effet : « arrivaient », « heurtait », « montaient ». Le lecteur peut d’autant plus s’imaginer la scène que différentes sensations sont sollicitées : le toucher (« heurtait »), l’ouïe (« tintait » l 7 , « tapage » (l 5), « bruissement » (l6) et la vue (« vapeur », « nuée blanchâtre »).

Enfin, on peut également souligner que la description du paysage semble prendre vie. Les sixième et septième paragraphes décrivent le bateau et la nature qui l’entoure. La cheminée est personnifiée comme le montre ce passage : « crachait avec un râle lent et rythmique son panache de fumée noire ». Les verbes de mouvements : « coulaient » « tremblait » « tournant » « battaient » participent à rendre la scène vivante. Certaines sonorités, notamment l’allitération en [r], miment le ronronnement du bateau : « tremblait sous une petite vibration intérieure et les deux roues, tournant rapidement… ». Pour la description de la rivière, le narrateur adopte des propositions plus longues comme pour imiter le flux paisible de la rivière.

Après avoir vu que cet incipit était réaliste, nous allons nous intéresser au portrait du personnage qui semble être décalé. Au début du roman, le narrateur va fournir au lecteur les informations essentielles sur le personnage qui va devenir le héros de l’histoire. Son nom et prénom nous sont fournis : « Frédéric Moreau » ainsi que son âge : « 18 ans ». On peut supposer qu’il est d’une origine sociale modeste puisque pour vivre à Paris, il compte sur l’argent qu’il compte recevoir suite au décès d’un oncle : « sa mère espère un héritage ». Le passé récent du personnage est donné puisqu’on apprend qu’il vient d’obtenir le baccalauréat (« nouvellement reçu bachelier »), de même que ses projets d’études ultérieures : Frédéric souhaite « faire son droit ». Le héros va donc être un jeune homme qui démarre dans la vie et espère intégrer la société parisienne. C’est donc le personnage-type du roman de formation, souvent choisi par les auteurs réalistes.

Outre son état-civil, certains éléments nous permettent de reconstituer un portrait physique et moral du personnage. Toutefois, nous avons très peu d’information sur son aspect extérieur : seuls ses « longs cheveux » (l 11) sont mentionnés. Cette coupe peut nous permettre de supposer que le jeune homme à un tempérament d’artiste. Cette hypothèse semble être confirmé par le carton (à dessins) qu’il porte sous son bras ainsi que par le champ lexical de l’art : « drame », « tableaux », « vers ». Celui-ci est utilisé au moment où l’on nous fait part des rêves secrets de Frédéric. Enfin, celui-ci semble être un héros mélancolique et désenchanté. Sa position au gouvernail, c’est-à-dire tourné vers Paris, indique son regret de ne pouvoir y séjourner : « et il se dédommageait de ne pouvoir séjourner dans la capitale, en regagnant sa province par la route la plus longue » (l 20). Le personnage se sent injustement condamné au malheur : « il trouvait que le bonheur mérité par l’excellence de son âme tardait à venir », phrase qui témoigne également de son orgueil.

Enfin, pour donner une image complète et nuancée du personnage, le narrateur ne cesse d’alterner les points de vue adoptés. Au début du texte, le paysage et le personnage sont décrits à travers une focalisation externe. Seul ce qui est visible est mentionné. Puis, le narrateur devient omniscient en nous faisant part de toutes les informations dont il dispose sur Frédéric. A nouveau, le point de vue externe est employé pour la description du bateau et du paysage. Enfin, il choisit un point de vue interne au personnage pour rapporter les rêves du héros : « Frédéric pensait à la chambre… ». Ainsi, au fil du passage, la façon de désigner le personnage évolue : elle est d’abord indéfinie « un jeune homme de dix-huit ans » puis très précise et très respectueuse : « M.Frédéric Moreau ». Enfin, le personnage est simplement nommé « Frédéric ». Le lecteur a ainsi la sensation d’être de plus en plus complice avec le personnage dont il va suivre les aventures.

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